Un début familier et inquiétant

Au fond des bois, en ces temps de famine, un père et une mère désespèrent de nourrir leur progéniture. Sept enfants espiègles, sept bouches voraces qui ont déjà bien grandi. Sauf Tipou, la petite dernière, qui peine à trouver sa place et rêve d’aventure. Justement, la forêt cache d’inquiétants mystères. Et voilà que le Petit Poucet et ses frères s’échouent dans la masure, eux qui viennent du village, où il se murmure qu’un monstre se cache au fond des bois.

Une revisite de conte moderne

Flore Vesco joue avec la matière des contes et réinterprète Le Petit Poucet (mâtiné d’éléments d’autres contes), dans une réécriture audacieuse, portée par une langue ciselée, maîtrisée, riche et inventive. Le thème de la faim est omniprésent (notamment via le champ lexical de la nourriture) et la famine amène à d’autres dévorations, ce qui conduit parfois à des scènes dérangeantes. Le récit, volontiers sombre, étrille le patriarcat et l’influence de la gent masculine sur la gent féminine, que l’on veut sage, discrète et en jupe, quand bien même celle-ci ne rêve que de courir à sa guise dans les bois. Il est aussi question des subtils liens entre mœurs et éducation, comme de l’importance du conte sur la formation de la société. La narration chorale permet enfin de distiller des indices et de ménager des retournements de situation qui dynamisent la réécriture.