Un album atypique entre conte et fable

Dans un lointain pays règne un terrible tyran. Craignant de perdre son pouvoir, il interdit de prononcer certains mots, en premier lieu « révolution » : si ce mot disparaît, personne n’aura l’idée de se révolter. Peu à peu, la langue est vidée de ses mots, puis des lettres à l’intérieur des mots dangereux. Bientôt liberté, plaisir, bonheur tombent dans l’oubli… jusqu’à ce qu’une forme de résistance se crée.

Une réflexion philosophique sur le pouvoir des mots

Cet album atypique, entre conte et fable, montre comment un pouvoir dictatorial musèle un peuple entier. Avec subtilité, il offre une réflexion philosophique sur le pouvoir des mots et leur importance pour vivre en liberté. Le mot crée la chose : s’il disparaît, la notion meurt et les émotions et l’essence même de l’humanité s’effacent. Texte et images se confrontent, instaurant une progressive sensation de malaise. Ainsi, l’odieux tyran apparaît souvent souriant, portant une chemise rose sur laquelle figurent des ciseaux, omniprésents chez lui (objets de collection, motifs sur le papier peint, les draps…), symbole de cette censure qui coupe les mots. Il est le seul personnage à être caractérisé et aucun autre n’est mis en scène : l’anonymat des foules est le terreau sur lequel grandit la dictature, mais le collectif est aussi ce qui donnera force à la révolte. Un bel album à conseiller à partir de 10 ans, qui peut se lire sous plusieurs angles : fragilité de la démocratie, force des mots et du groupe…