Du 30 juin au 2 juillet 2025, Lecture Jeunesse a participé au congrès annuel de l’AMCSTI à Orléans, rassemblant près de 500 pros de la culture scientifique, technique et industrielle. Un congrès qui bat des records de participation, dans un contexte particulièrement tendu pour le milieu de la culture¹Voir : La pétition pour sauver le Palais de la Découverte, la crise de la culture scientifique, la fermeture imminente de l’association Gulliver.

Face aux défis démocratiques, aux assauts contre la science et à la montée de la désinformation, ce congrès a réaffirmé l’importance d’un écosystème engagé et solidaire en faveur de la culture scientifique. Ce congrès, sur le thème du futur, a aussi mis en lumière la place que peuvent occuper la lecture, l’écriture et les récits dans la reconstruction d’un imaginaire commun. Retour sur les moments clés qui font écho aux actions de Lecture Jeunesse.

Culture scientifique : Raconter les futurs pour mieux les construire

La plénière d’ouverture réalisée par Ketty Steward, auteure, psychologue clinicienne et docteure en psychologie, Anne-Sophie Novel, journaliste et auteure, Gilles Garel, professeur titulaire de la chaire de gestion de l’inno-vation du CNAM, et Valérie Masson-Delmotte, directrice de recherche au CEA, a donné le ton : face à un avenir incertain, il est essentiel d’ouvrir les imaginaires. Les récits de science-fiction, les scénarios prospectifs ou les ateliers d’écriture sont autant de moyens de penser d’autres possibles. Car projeter un futur, c’est déjà une manière d’agir sur le présent. Les intervenantes et intervenants ont pointé :

• Le piège d’un futur “désirable” imposé comme norme ;
• Le besoin d’accueillir les incertitudes, de rendre visibles les choix (ou non-choix) collectifs, et de s’appuyer sur des savoirs locaux et situés pour penser l’adaptation ;
• L’importance de pluraliser les récits et de créer des espaces de co-écriture participative (ex : ateliers de world-building, fiction spéculative, récits de territoire).

Lecture Jeunesse intègre pleinement cette approche dans ses projets : en valorisant la fiction, en suscitant l’écriture collective ou en proposant des formats comme le podcast, nous invitons les jeunes à devenir eux-mêmes auteurs de futurs. Ces récits ne sont pas neutres : ils participent à structurer une vision du monde, à poser des questions éthiques et à envisager des solutions collectives. C’est aussi ce que nous expérimentons avec les adolescents : leur permettre non seulement de comprendre les sciences, mais d’écrire avec elles, de s’en emparer comme outil critique et créatif.

Lecture et sciences : une passerelle vers l’engagement

Dans sa mini-conférence, Agathe Franck, responsable de l’Observatoire de la lecture et de l’écriture des adolescents, a souligné la place essentielle de la lecture dans la médiation scientifique. Pour les jeunes, le livre représente bien plus qu’un vecteur de savoirs : il est un déclencheur d’imaginaire, un outil d’identification et un levier pour l’esprit critique.

À travers des études sur la place des femmes scientifiques dans l’édition ado²Un article sur ce rapport est paru au bulletin de l’AMCSTI : https://www.amcsti.fr/publications/lecture-une-voie-pour-ouvrir-les-jeunes-a-la-culture-scientifique-mais-attention-aux-stereotypes-de-genre/ ou les usages du livre dans les actions de médiation, Lecture Jeunesse met en lumière les enjeux de représentation. Des projets comme Cortex, où les adolescents débattent puis réalisent des podcasts sur des sujets d’actualité, incarnent cette volonté d’impliquer les jeunes dans la production de récits scientifiques.

Débat, désinformation et engagement : les jeunes face à l’espace public

L’atelier de l’association Deb’acteur, mené avec l’Inria, a permis aux participant·es de simuler une assemblée parlementaire autour d’une loi sur le numérique responsable. Une mise en situation pédagogique pour expérimenter la prise de parole, la négociation et l’argumentation, tout en confrontant des idées sur des enjeux complexes. Une démarche qui fait écho à l’objectif de Lecture Jeunesse : aider les jeunes à s’emparer du débat démocratique en les outillant pour décrypter l’information.

Dans le même esprit, la table ronde “Médiatiser les futurs” a ouvert un dialogue fertile entre journalistes, acteurs associatifs et médias indépendants. Comment informer sur des sujets complexes, en évitant à la fois l’angoisse paralysante et les dérives sensationnalistes ?

La table ronde “Médiatiser les futurs” a mis en évidence les tensions entre l’information scientifique (longue, nuancée, incertaine) et les logiques médiatiques (immédiateté, polarisation, formatage algorithmique). Les échanges ont montré :

• Une pénurie persistante de journalistes scientifiques formés ;
• Le rôle des médias associatifs et indépendants dans la production d’une information plus lente, plus engagée, mais souvent peu visible ;
• La fracture de confiance entre experts, journalistes et citoyens, notamment les jeunes, peu représentés comme public prioritaire.

Une culture scientifique et des médiations adaptées aux jeunes d’aujourd’hui

Face aux bouleversements climatiques, technologiques et sociaux, la culture scientifique ne peut faire l’économie d’un travail ciblé vers les jeunes générations. Lecture Jeunesse s’attache à répondre à ce défi par des projets ancrés dans les pratiques culturelles adolescentes, en combinant lecture, débat, oralité, numérique et co-construction.

Le congrès AMCSTI 2025 a confirmé que ce travail est indispensable : pour restaurer la confiance, pour lutter contre la désinformation, et surtout pour permettre à chaque jeune de devenir un citoyen ou une citoyenne capable de comprendre, questionner et transformer le monde.

Il renforce aussi la nécessité de poursuivre le travail engagé par Lecture Jeunesse : qu’il s’agisse de l’analyse des pratiques culturelles des adolescents, du développement de projets innovants favorisant leur accès aux savoirs, ou de la sensibilisation et de la formation des professionnels de la médiation.

Références

• 1
  Voir : La pétition pour sauver le Palais de la Découverte, la crise de la culture scientifique, la fermeture imminente de l’association Gulliver
• 2
  Un article sur ce rapport est paru au bulletin de l’AMCSTI : https://www.amcsti.fr/publications/lecture-une-voie-pour-ouvrir-les-jeunes-a-la-culture-scientifique-mais-attention-aux-stereotypes-de-genre/