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La médiation numérique en bibliothèque (2)

Dominique Arot donne son point de vue sur les enjeux du numérique pour ce qui est de la médiation en bibliothèque. En 2012, Anne Clerc l’interroge sur l’avenir du métier de bibliothécaire et sur les évolutions de la formation des professionnels.

Anne Clerc : Les étudiants se destinant au métier de bibliothécaire sont-ils suffisamment formés au numérique pour accompagner les publics ?

Dominique Arot : Non, la formation au numérique des futurs bibliothécaires est insuffisante. La priorité est donnée à la réussite aux concours et à la validation des épreuves de culture générale. Le cursus repose donc sur une approche académique des connaissances. En revanche, on constate que les bibliothécaires manifestant un intérêt pour le numérique et les réseaux sociaux ont le plus souvent d’abord développé cette orientation à titre individuel1C’est ce qui est souligné par Walter Galvani dans son mémoire de recherche : La Bibliothèque Nationale de France sur les réseaux sociaux; http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/document-56706. Ainsi, de plus en plus de professionnels partagent et échangent sur leurs compétences via les réseaux sociaux. On peut citer récemment, la création du groupe « Jeux vidéo en bibliothèque2https://www.facebook.com/groups/307223672648685/ » sur Facebook qui compte plus de 300 membres et qui témoigne d’un dynamisme remarquable. Du côté des bibliothécaires universitaires, les professionnels maîtrisent également parfaitement les enjeux des réseaux sociaux et du numérique.

AC : Aujourd’hui, quelle est la place de la bibliothèque dans l’accès et la formation au numérique en direction des publics ?

DA : Les établissements ont contribué à l’initiation des usagers au maniement des ordinateurs et à l’utilisation d’Internet – notamment en direction des seniors. Les professionnels ont toujours su s’adapter aux évolutions technologiques et aux attentes des publics. Il faut souligner que les directeurs d’établissement jouent un rôle déterminant dans le dynamisme d’une structure et dans le développement d’une politique orientée vers les enjeux numériques. Enfin, face à la pression sur l’emploi et aux restrictions budgétaires, pourquoi ne pas envisager d’externaliser certaines missions plus répétitives – comme le catalogage par exemple. Cela permettrait de disposer de plus de temps pour la médiation.

AC : Quels seront les enjeux de la profession dans les années à venir ?

DA : Un nouveau métier est amené à se développer, celui de médiateur numérique et de nombreuses places sont à pourvoir pour ceux qui se spécialiseraient dans ce domaine. Le métier de bibliothécaire est en pleine mutation. La communication, par exemple, doit être développée en direction des publics, tout comme l’action culturelle dans les bibliothèques municipales ou les bibliothèques universitaires. L’ouverture ou l’accentuation de partenariats culturels et éducatifs, en particulier avec les établissements scolaires, constituent autant de possibilités d’ancrer davantage la bibliothèque dans la cité.

AC : Que préconisez-vous en terme de formation ?

DA : Il est nécessaire de renforcer la formation initiale et de solliciter un plus grand nombre d’intervenants pour sensibiliser les « apprentis bibliothécaires » aux enjeux du numérique. Il faut aussi encourager la formation tout au long de la vie professionnelle, favoriser la diversité des carrières et envisager des passerelles entre les différentes catégories statutaires.

Entretien avec Dominique Arot par Anne Clerc. Article paru dans la revue Lecture Jeune 143 (septembre 2012).

Dominique Arot

est doyen de l’Inspection générale des bibliothèques. Il est l’un des auteurs de l’ouvrage Horizon 2019 : bibliothèques en prospective (sous la dir.d’Anne-Marie Bertrand, Presses de l’ENSSIB, 2011).

Références